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2 mai 2011
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La chimiothérapie néoadjuvante comparée à la chirurgie seule chez les patients atteints d’un cancer gastrique ou du cardia avancé : pas d’avantage en survie

Dans cette étude, la chimiothérapie néoadjuvante exclusive n’a pas permis d’apporter un avantage en survie par rapport à la chirurgie seule en cas de cancer gastrique ou cardial opérable. Les standards restent donc la chimiothérapie périopératoire, la radiochimiothérapie postopératoire ou la chimiothérapie postopératoire.

Même en cas de maladie résécable sans métastase à distance, le pronostic du cancer gastrique est mauvais, avec un taux de résection R0 et une survieglobale faibles, mais la chimiothérapie périopératoire à base de 5FU ainsi que la radiochimiothérapie postopératoire permettent d’améliorer ce pronostic. Notamment, l’essai MAGIC a montré la supériorité d’une chimiothérapie périopératoire comparée à une chirurgie seule, en termes de survies globale et sans progression, résultats confortés par l’étude ACCORD-07. L’intérêt de la chimiothérapie adjuvante a été difficile à prouver mais une métaanalyse récemment publiée semble pouvoir la valider.

L’essai rapporté ici propose d’évaluer l’apport de la chimiothérapie néoadjuvante exclusive à base de 5FU et de cisplatine chez les patients atteints d’un cancer gastrique ou cardial avancé mais opérable.

Patients et méthodes

Les patients atteints d’un adénocarcinome gastrique avancé ou du cardia ont été randomisés entre une chimiothérapie néoadjuvante suivie de chirurgie et une chirurgie seule. Le bilan d’extension habituel était complété par une laparoscopie associée à une échographie hépatique dans le même temps, afin d’améliorer le staging. Le traitement par chimiothérapie consistait en 2 cycles de 48 jours comportant cisplatine (50 mg/m2) en 1 h avec hydratation à J1, J15 et J29, suivi de l’acide folinique (500 mg/m2) en 2 h et du 5FU (2 000 mg/m2) en perfusion continue sur 24 h à J1, J8, J15, J22, J29 et J36. Avant le 2e cycle, une évaluation endoscopique et scannographique était réalisée pour s’assurer de l’absence de progression. La chirurgie était réalisée dans les 14 jours après randomisation dans le groupe chirurgie seule, et dans les 4 semaines suivant le dernier jour de chimiothérapie dans le groupe chimiothérapie. Le geste chirurgical consistait en une gastrectomie subtotale ou étendue, avec de préférence un curage ganglionnaire de type D2. L’objectif primaire était la survie globale. Les objectifs secondaires étaient le taux de résection R0, la survie sans récidive, la toxicité de la chimiothérapie, la morbidité postopératoire et l’effet de la chimiothérapie sur la tumeur primitive et les ganglions métastatiques.

Résultats

Au total, 144 patients ont été randomisés (1:1), et l’étude a été prématurément interrompue du fait du faible recrutement (40 %). Plus de la moitié des patients (52,8 %) inclus présentaient une tumeur du 1/3 supérieur de l’estomac ou du cardia. La puissance statistique de l’étude est donc limitée (282 évènements étaient requis pour montrer une amélioration de la survie médiane de 17 à 24 mois avec la chimiothérapie, avec une puissance de 80 %). Dans le groupe chimiothérapie, le taux de réponse était de 36,2 %. Le taux de résection R0 était de 81,9 % après chimiothérapie contre 66,7%après chirurgie seule (p = 0,036). Le taux de ganglions métastatiques était plus élevé dans le groupe chirurgie seule par rapport au groupe chimiothérapie (76,5%vs 61,4 % ;p=0,018). Les complications postopératoires étaient plus fréquentes dans le groupe chimiothérapie (27,1 % vs 16,2% ;p = 0,09). Après un suivi médian de 4,4 ans et 67 décès, le bénéfice en survie n’était pas démontré (HR :0,84 ; IC 95 % :0,52-1,35 ; p = 0,466).

Commentaire

Cette étude montre que la chimiothérapie néoadjuvante est supérieure à la chirurgie seule en termes de résection R0, de taille de la tumeur, d’atteinte ganglionnaire, mais l’objectif principal de l’étude, de démontrer un bénéfice en survie de la chimiothérapie néoadjuvante, n’a pas été atteint. Plusieurs hypothèses peuvent expliquer cet échec :

  • la puissance statistique de l’étude n’est pas suffisante ;
  • il existe des différences par rapport aux autres essais comparant chimiothérapie et chirurgie seule : la qualité de la chirurgie semble meilleure (curage ganglionnaire D2), le taux de cancer du 1/3 supérieur de l’estomac est plus élevé ;
  • l’impact d’une chimiothérapie postopératoire complémentaire a manqué.

Référence

[1] Schuhmacher C, Gretschel S, Lordick F, et al. Neoadjuvant chemotherapy compared with surgery alone for locally advanced cancer of the stomach and cardia: European Organisation for Research and Treatment of Cancer randomized trial 40954. J Clin Oncol 2010 Dec 10;28(35):5210-8. Epub 2010 Nov 8