Traitement par Gemox et Cetuximab pour cancer des voies biliaires : une étude de phase II prometteuse
En cas de cancer de voies biliaires non résécables, non prétraités, l’adjonction de Cetuximab au schéma GEMOX semble intéressante dans plusieurs études de phase II, mais doit confirmer son intérêt dans l’étude de phase III BINGO
Le cancer des voies biliaires est une tumeur rare, mais en incidence croissante. Le seul traitement curatif reste la chirurgie, mais avec taux de récurrence élevé. Cependant, dans la grande majorité des cas, le diagnostic est porté à un stade non résécable. Le pronostic demeure donc mauvais, avec une survie à 5 ans inférieure à 15 %. La chimiothérapie palliative repose sur la gemcitabine, associée à un sel de platine, mais a une activité limitée. De nouvelles combinaisons sont donc nécessaires pour améliorer la survie. Dans ce contexte, le cetuximab, anticorps monoclonal dirigé contre le récepteur de l’« epidermal growth factor » (EGFR), fait figure de candidat potentiel.
En effet, EGFR semble une cible intéressante, car il est activé in vitro par les sels biliaires, ce qui conduit à la libération de cyclooxygénase 2 (COX-2), impliquée dans la genèse et la progression des cancers biliaires. Peu d’informations sont disponibles concernant le statut KRAS des cancers biliaires dont la mutation est connue pour entraîner une résistance au cetuximab en cas de cancer colorectal métastatique. Une précédente étude sur 9 patients montre une bonne tolérance et une activité de l’association GEMOX et cetuximab, sans information sur le statut KRAS [1]. L’essai [2] de phase II ici rapporté a testé l’association GEMOX et cetuximab, en première ligne de traitement chez des patients atteints d’un cholangiocarcinome, ainsi que l’influence du statut tumoral de KRAS sur le taux de réponse.
Patients et méthodes
Entre octobre 2006 et juillet 2008, 30 patients présentant un cancer des voies biliaires non résécable ont été inclus dans cette étude pour recevoir un traitement comportant cetuximab 500 mg/m2 à J1, Gemcitabine 1 000 mg/m2 à J1 et oxaliplatine 100 mg/m2 à J2, tous les 15 jours, pour un total de 12 cycles. La réponse tumorale était évaluée par scanner ou IRM tous les 4 cycles, selon les critères RECIST. Une recherche de mutation des codons 12, 13 et 61 du gène KRAS était réalisée par PCR, à partir d’une biopsie de la tumeur comportant aumoins 70 % de cellules tumorales. L’objectif principal de l’étude était le taux de réponse. Les objectifs secondaires étaient le profil de tolérance, le taux de résection secondaire, la survie sans progression (SSP), la survie globale (SG), la corrélation entre le statut mutationnel KRAS et la réponse tumorale.
Résultats
Le nombre de cycles médians était de 7,5 cycles (2-12). Une réponse objective était observée chez 19 patients (63 %) dont 3 (10 %) présentaient une réponse complète, et 16 (53 %) une réponse partielle. Le taux de contrôle de lamaladie était de 80 %. Neuf (9) patients ont été éligibles pour une résection secondaire après une réponse majeure.
Le suivi médian était de 22 mois (12,5-31,1). La SSP médiane était de 8,8 mois (5,1-12,5), et la SG médiane était de 15,2 mois (9,9-20,5). Une mutation KRAS a été retrouvée pour seulement 3 tumeurs (10 %) dont 2 ont présenté une réponse partielle et 1 une stabilité.
Une relation positive entre le rash acnéiforme et la réponse au traitement était observée (p = 0,01). Aucune toxicité de grade 4 n’a été observée.
Commentaire
Cette étude de phase II, de faible effectif, affiche des résultats prometteurs, notamment en termes de réponse tumorale et de contrôle de la maladie, au prix d’une toxicité acceptable. Des résections secondaires ont pu être réalisées, permettant d’augmenter la SSP.
Concernant le statut KRAS, le nombre de mutations est faible et il est difficile d’interpréter sa relation à la réponse tumorale. Mais il est intéressant de noter que, contrairement au cancer colorectal, des réponses partielles ont été observées en cas de mutation.
Rappelons enfin que l’essai randomisé de phase II BINGO, comparant GEMOX avec ou sans cetuximab, a montré, dans une population comparable lors de l’analyse intermédiaire, une augmentation de la SSP à 4 mois dans le bras avec cetuximab et va être poursuivie en phase III [3].
Références
[1] Paule B, Bralet M, Herelle M, et al. Cetuximab plus gemcitabine/oxaliplatin (GEMOX) for patients with unresectable/récurrent intrahepatic cholangiocarcinoma refractory to GEMOX. ProcAmSoc Clin Oncol 2006;24:14084(abstr).
[3] Malka D, Trarbach T, Fartoux L, et al. A multicenter, randomized phase II trial of gemcitabine and oxaliplatin (GEMOX) alone or in combination with biweekly cetuximab in the first-line treatment of advanced biliary cancer: interim analysis of the BINGO trial. Proc Am Soc Clin Oncol 2009;27: 4520(abstr).