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2 mai 2011
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Les comorbidités, âge et indice de performance n’altèrent pas le bénéfice apporté par le cetuximab !

En dernière ligne thérapeutique du CCRm, le cetuximab apporte un gain significatif de survie par rapport aux meilleurs soins palliatifs, y compris chez les patients de plus de 65 ans ou présentant des comorbidités.

Parmi les études ayant contribué à démontrer l’intérêt du cetuximab dans les cancers colorectaux métastatiques (CCRm) sans mutation du gène KRAS, on compte l’essai de phase III NCIC CTG CO.17 qui avait rapporté la supériorité du cetuximab en monothérapie par rapport à des soins de confort chez des patients chimiorésistants à la fois en termes de survie sans progression (SSP) et de survie globale (SG) [1,2]. Nous résumons ici une nouvelle publication à propos de cette même étude [3] portant sur l’analyse de l’impact des comorbidités, de l’âge et de l’indice de performance sur le bénéfice apporté par le cetuximab.

Patients et méthodes

La présence de comorbidités était évaluée selon l’indice de comorbidités de Charlson (ICC) par 2 cliniciens indépendants (Tableau 1), et il était également noté la survenue préalable d’un événement thromboembolique veineux. L’indice de performance était évalué selon l’échelle de l’ECOG. Une analyse de la corrélation entre le score de l’ICC, les paramètres cliniques et la survie a été ensuite réalisée.

Tableau 1.
1 Infarctus du myocarde (antécédent, pas seulement un changement électrique) Insuffisance cardiaque congestive Artériopathie périphérique (incluant anévrysme aortique > 6 cm) AVC/AIT sans déficit ou déficit léger Démence Pathologie pulmonaire chronique Maladie de système Pathologie ulcéreuse gastroduodénale Hépatopathie chronique légère (sans HTP, hépatites chroniques incluses) Diabète non compliqué
2 AVC avec hémiplégie séquellaire Insuffisance rénale modérée ou sévère Diabète compliqué Tumeur sans métastases (avec recul < 5 ans) Leucémie (aiguë ou chronique) Lymphome, myélome
2 Hépatopathie modérée ou sévère
6 Tumeur solide métastatique SIDA déclaré
Pour chaque décade > 40 ans, ajouter 1 point. Le patient hémodialysé est d’emblée coté 2.

 

Résultats

  • Sur les 572 patients inclus dans l’essai NCIC CTG CO.17, 41 % avaient au moins 65 ans et 25 % avaient des comorbidités avant la randomisation. Le score selon l’ICC était de 1 dans 21 % des cas et ≥ 2 dans 4 % des cas. Des discordances dans l’évaluation du score, selon l’ICC, entre les différents cliniciens a été observée dans 34 cas, ce qui a conduit à une concordance interobservateurs de 94 %.
  • Parmi l’ensemble des paramètres clinicobiologiques étudiés, seul l’âge était significativement corrélé à la présence de comorbidités en analyse uni- (p = 0,002) et multivariée (p = 0,008).
  • La présence de comorbidités était, de façon surprenante, significativement associée à une meilleure SG en analyse univariée (HR = 0,80 pour un score d’ICC ≥ 1 vs 0 ; IC 95 % : 0,65-1,00 ; p = 0,047), avec une tendance non significative en analyse multivariée (HR = 0,76 ; IC 95 % : 0,57-1,02 ; p = 0,07). Cette association était retrouvée de façon significative en analyse uni- (HR = 0,66 ; IC 95 % : 0,47-0,92 ; p = 0,02) et multivariée (HR = 0,59 ; IC 95 % : 0,37-0,95 ; p = 0,03) chez les patients traités par cetuximab, ce qui n’était pas le cas des patients du groupe soins de confort.
  • Le bénéfice du cetuximab par rapport aux soins de confort en termes de SG était retrouvé quel que soit l’âge des patients : HR = 0,77 ; IC 95 % : 0,61-0,98 pour les patients < 65 ans et HR = 0,75 ; IC 95 % : 0,56-1,00 pour les patients ≥ 65 ans.
  • Un meilleur indice de performance était associé à une meilleure SG en analyse uni- et multivariée (HR= 1,92 pour un IP = 2 vs 0 ; IC 95 % : 1,34-2,74 ; p < 0,0001). Les autres facteurs significatifs de bon pronostic sur la SG en analyse multivariée étaient un délai d’au moins 2 ans entre le diagnostic et la randomisation, des LDH et des ALAT normales, l’absence de toxicité sur l’hémoglobine, un statut KRAS sauvage et un traitement par cetuximab. L’âge n’avait, en revanche, aucun impact sur la SG.
  • Aucune association significative n’a été mise en évidence entre la présence de comorbidités, l’âge et la SSP ou la réponse au cetuximab alors qu’un délai d’au moins 2 ans entre le diagnostic et la randomisation, un statut KRAS sauvage et un traitement par cetuximab étaient significativement associés à une meilleure SSP et qu’un délai d’au moins 2 ans entre le diagnostic et la randomisation et un statut KRAS sauvage étaient associés à un taux de réponse au cetuximab plus important.

Commentaires

Cette étude suggère que :

  • les patients âgés de plus de 65 ans bénéficient autant du cetuximab que les patients plus jeunes en dernière ligne thérapeutique ;
  • les patients avec comorbidités bénéficient autant du cetuximab que les autres ;
  • un bon indice de performance est associé à une meilleure survie.

Au vu de ces résultats, il semble donc que chez les patients ayant un bon indice de performance, la présence de comorbidités et l’âge ne doivent pas être un frein à l’utilisation du cetuximab (tout du moins en comparaison avec des soins de confort dans cette situation de chimiorésistance).

Références

[1] Jonker DJ, O’Callaghan CJ, Karapetis CS, et al. Cetuximab for the treatment of colorectal cancer. N Engl J Med 2007;357:2040-8.

[2] Karapetis CS, Khambata-Ford S, Jonker DJ, et al. K-ras mutations and benefit from cetuximab in advanced colorectal cancer. N Engl J Med 2008;359:1757-65.

[3] Asmis TR, Powell E, Karapetis CS, et al. Comorbidity, age and overall survival in cetuximab-treated patients with advanced colorectal cancer (ACRC)–results from NCIC CTG CO.17: a phase III trial of cetuximab versus best supportive care. Ann Oncol 2011;22:118-26. Indice de comorbidités de Charlson.