Les complications possibles d’un cancer du pancréas sont les suivantes :
– douleurs,
– jaunisse ou ictère,
– vomissements,
– gonflement du ventre lié à une ascite (présence de liquide dans le péritoine),
– dénutrition,
– fatigue,
– anxiété ou dépression.
Toutes ces complications ne surviennent pas systématiquement chez tous les malades !
Comment sont traitées les douleurs ?
Elles sont fréquentes au cours de cette affection car le pancréas est localisé dans une région riche en nerfs sensitifs, appelée plexus coeliaque. Elles révèlent souvent la maladie. De manière caractéristique, elles siègent au creux de l’estomac et irradient vers le dos ou sous les côtes. Elles sont parfois intenses et prolongées.
Leur prise en charge repose sur les traitements spécifiques de la tumeur (chirurgie, radiothérapie, chimiothérapie) et sur l’administration de médicaments anti-douleurs appelés antalgiques.
La chirurgie
L’existence de douleurs signale souvent une extension de la tumeur autour du pancréas. Dans le cas où la tumeur ne peut être enlevée, si une intervention a été effectuée (par exemple pour traiter une jaunisse ou une obstruction au niveau du duodénum par des dérivations biliaire et/ou digestive), le chirurgien peut injecter une solution d’alcool dans les plexus nerveux qui entourent le pancréas. Ce geste permet de diminuer la douleur dans un nombre important de cas. Le principal incident pouvant survenir après ce geste est l’apparition d’une diarrhée par accélération du transit.
La chimiothérapie
Il a été montré que chez certains malades, l’administration d’une chimiothérapie est susceptible d’être efficace sur les douleurs et de diminuer ou d’arrêter un traitement antalgique. Toutefois, un tel effet, lorsqu’il survient, est retardé (il faut attendre généralement 1 mois après le début de la chimiothérapie).
La radiothérapie ou radio-chimiothérapie
Ce traitement peut avoir un effet important sur les douleurs, même s’il peut entraîner parfois des effets secondaires (nausées ou vomissements, diarrhée ou fatigue transitoires).
Les antalgiques
Ils sont quasi systématiquement utilisés car très maniables. Les médicaments principalement utilisés sont appelés dérivés morphiniques. Comme leur nom l’indique, ils dérivent de la morphine synthétisée à partir d’une plante, le pavot (papaver somniferum). La morphine a longtemps eu une connotation péjorative dans l’esprit général, car assimilée à la fin de vie des malades ou à la toxicomanie. En réalité, bon nombre de médicaments sont dérivés de la morphine et sont utilisés à très large échelle.
Les dérivés de la morphine sont généralement très efficaces sur les douleurs du cancer du pancréas à condition qu’ils soient administrés à doses adaptées. La voie orale doit être privilégiée. Les progrès des industriels qui fabriquent les médicaments ont permis de disposer de produits ayant des durées d’action très variées, adaptées à toutes les situations : courte pour les douleurs aigües (action durant 3-4h), ou à libération prolongée ayant une action longue (12 h ou 24 h) voire très longue (72h) pour les douleurs stabilisées, en traitement prolongé.
Le traitement débute avec une dose dépendant du poids du malade (souvent 1 mg par kg) puis augmenté en fonction des besoins. Lorsqu’une morphine à action prolongée est administrée (en général une prise matin et soir), des doses de morphine à action rapide peuvent être proposées en cas de survenue de pics douloureux. On les appelle « interdoses » (voir schéma ci-dessous).
D’autres modes d’administration que la voie orale par comprimés, gélules ou solutions sont possibles : patchs, applicateurs bucaux, instillation nasale, injection sous-cutanée ou intraveineuse.
Le but est de rendre le patient le plus autonome possible : on lui prescrit des inter-doses qu’il choisit ou non de prendre selon les circonstances. Il peut s’agir de cachets ou de gélules qu’il pourra prendre en fonction des besoins, à domicile.
En cas de fortes douleurs, des injections de morphine par voie veineuse (appelées « bolus ») peuvent être données par une pompe à morphine appelée PCA (Pompe Auto-Contrôlée). Le principe est l’administration séquentielle de petites doses de morphine à la demande réalisée par le malade lui-même en fonction de ses besoins. La PCA n’est proposée qu’après « titration » de la douleur, c’est-à-dire après l’institution d’un traitement de fond efficace sur la majorité des douleurs.
Les explications concernant le fonctionnement du dispositif et sa mise en place sont sous la responsabilité d’infirmières et de médecins ayant une grande habitude de cette technique. Ce traitement est d’ailleurs habituellement instauré dans une structure hospitalière mais il peut être poursuivi à domicile le cas échéant.
L’administration de dérivés morphiniques peut cependant entraîner des effets qu’il faut soigneusement prendre en charge :
– une constipation : celle-ci est quasiment constante et justifie la prise de laxatifs,
– une somnolence fréquente en début de traitement : elle est liée à l’effet du produit mais aussi au soulagement obtenu : le malade qui dormait mal depuis plusieurs nuits à cause de la douleur récupère une « dette de sommeil ». Dans ce cas, il faut éviter la conduite d’engins motorisés et la prise simultanée d’alcool.
Beaucoup plus rarement…
– une envie de se gratter (appelée prurit) ou une difficulté à uriner peuvent se rencontrer,
– la survenue de troubles sérieux de la conscience ou de la respiration peuvent apparaître et traduisent alors l’administration d’une dose excessive. Ils nécessitent un traitement en milieu hospitalier, – une dépendance à la morphine peut survenir (moins de 1 cas sur 10 000) chez les malades traités pour un cancer et qui reçoivent un traitement morphinique.
D’autres traitements médicamenteux peuvent être utiles en complément : les anti-inflammatoires, les médicaments dits « neurogènes » ayant une action très efficace sur les composantes dites neurogènes de la douleur (les douleurs neurogènes sont brèves et fulgurantes, telles qu’on peut les rencontrer dans le zona ou certaines compressions de nerfs). Ils sont utilisés habituellement comme anti-convulsivants ou anti-dépresseurs. Citons la gabapentine, la prégabaline, l’oxcarabazépine ou l’amitryptiline. La destruction des plexus nerveux autour du pancréas peut être efficace sur les douleurs (voir paragraphe « chirurgie »). Elle peut aussi être réalisée sans chirurgie par injection d’alcool sous contrôle d’un scanner ou par échoendoscopie (EE) par des équipes spécialisées.
Existe-t-il de douleurs rebelles au traitement ?
Avec les modalités thérapeutiques que nous venons de détailler, la grande majorité des douleurs peuvent être calmées grâce à une prescription adaptée. Lorsqu’elles sont rebelles, un conseil auprès de médecins spécialistes de la douleur doit être demandé. Les traitements sont décidés au cas par cas (injection de dérivés morphiniques autour de la moelle épinière, etc.) Des médecins et infirmières ayant une compétence spécifique (centre anti-douleurs, équipes mobiles,…) peuvent apporter une aide précieuse au patient dans la prise en charge des douleurs.
Comment est traité l’ictère ?
Lorsque l’ictère, plus couramment appelée la jaunisse, est liée à un blocage du canal cholédoque par la tumeur, il existe 2 manières de résoudre le problème lorsque la tumeur n’est pas enlevable en totalité par la chirurgie :
– mise en place d’une prothèse en plastique ou en métal dans la voie biliaire au cours d’une endoscopie digestive (par un gastroentérologue spécialisé pour ces techniques) ou sous contrôle d’une échographie ou d’un scanner (par un radiologue).
Ce geste nécessite une anesthésie générale et une hospitalisation courte durant généralement 24h à 48 h. Les complications de ce geste sont assez rares (douleurs, pancréatite ou fièvre). Le drainage réalisé est rapidement efficace 9 fois sur 10. Cependant, au bout de plusieurs mois, la prothèse peut se boucher. Si elle est en plastique, on la retire pour la changer. Par contre, les prothèses métalliques ne s’enlevant pas, on peut mettre une autre prothèse à l’intérieur (plastique ou métallique) pour les désobstruer lors d’une nouvelle endoscopie,
– dérivation du canal cholédoque par un geste chirurgical. Ce geste a une efficacité prolongée mais il nécessite une intervention chirurgicale ; au cours de celle-ci, un autre geste est souvent réalisé (dérivation digestive, alcoolisation…).
Rarement, la jaunisse est due à la présence de métastases dans le foie. Dans ce cas, seul un traitement médical (chimiothérapie) est susceptible d’améliorer les choses. En revanche, un drainage des voies biliaires n’est pas indiqué.
Comment sont traités les vomissements ?
Ils peuvent avoir 3 causes :
– le plus souvent, il existe un obstacle sur le tube digestif,
– il peut s’agir d’un effet secondaire d’une chimiothérapie,
– rarement, au début d’un traitement, ils sont causés par un dérivé de la morphine.
L’obstacle digestif peut siéger sur le duodénum car le pancréas touche cet organe. Dans ce cas, on peut placer une prothèse dans la sténose (rétrécissement) sous contrôle endoscopique ou radiologique comme pour les sténoses biliaires (à ceci près que le calibre de la prothèse – toujours métallique cette fois – est plus important, adapté à celui de l’intestin).
Un geste chirurgical de dérivation entre l’estomac et l’intestin situé au-delà de la sténose (appelé jéjunum) est une autre solution. Parfois, l’obstacle est situé plus bas sur l’intestin et n’est pas accessible à une dérivation endoscopique ou chirurgicale. Lorsque les vomissements sont importants, rendant l’alimentation impossible, parfois associés à un arrêt du transit, une hospitalisation est nécessaire pour lever l’occlusion. Des traitements médicamenteux (dérivés de la cortisone…) sont administrés.
Lorsque les vomissements sont dus à la chimiothérapie, le traitement médical anti-vomitif doit être renforcé. Parfois, il existe un effet psychologique qui peut être réduit par un traitement sédatif. Les vomissements survenant lors de l’introduction d’un traitement morphinique sont passagers. Il est alors nécessaire de prendre des médicaments anti-vomitifs.
Comment sont traités les autres symptômes ?
Un gonflement du ventre peut survenir. Il peut être en rapport avec la présence de liquide dans le sac qui entoure les viscères (appelé péritoine). On l’appelle « ascite » en terme médical. Les mécanismes qui expliquent sa survenue sont complexes (inflammation du péritoine lié à la tumeur, gêne au retour du sang ou des lymphatiques…). Il s’accompagne parfois d’oedème (gonflement) des chevilles et des jambes. Lorsque la quantité de liquide est importante et embarrassante, les ponctions évacuatrices sont efficaces mais doivent souvent être répétées à intervalles réguliers.
L’amaigrissement et la dénutrition sont quasiment constants. Les traitements ralentissant l’évolution de la tumeur (chimiothérapie…) et une nutrition adaptée peuvent permettre de stabiliser le poids qui, cependant, ne reviendra pas à la normale. Dans certains cas, une nutrition artificielle (par perfusion) peut être recommandée si l’alimentation par la bouche est insuffisante.
Une diarrhée peut survenir. Elle peut être due aux traitements ou à une insuffisance de digestion des aliments par défaut partiel de fonctionnement du pancréas. Des extraits pancréatiques (gélules) sont alors proposés et doivent être pris pendant les repas et les collations. Parfois, la diarrhée est liée à une accélération du transit (on l’appelle « motrice »), souvent après une opération du pancréas, et on a recours aux freinateurs du transit (lopéramide…).
Un diabète peut se rencontrer chez certains patients. Il doit être soigneusement pris en charge car s’il est mal équilibré, cela favorise la perte de poids.
La fatigue peut être liée à la tumeur, aux douleurs si elles sont insuffisamment calmées, aux effets des traitements, à l’amaigrissement, à un manque de globules rouges (anémie) ou à une dépression.
L’anxiété et la dépression sont fréquentes.