Coup de froid sur l’endobrachyoesophage et le cancer superficiel de l’oesophage
Ces résultats préliminaires de la cryothérapie oesophagienne pour EBO ou tumeur intramuqueuse sont intéressants. Il convient désormais de mieux l’évaluer dans le cadre d’essais randomisés pour déterminer son efficacité à plus long terme et sa place par rapport aux autres traitements endoscopiques.
La radiofréquence et la cryothérapie sont des techniques de destruction endoscopique de la muqueuse oesophagienne qui ont été développées plus récemment que la mucosectomie endoscopique et la photothérapie dynamique. La cryothérapie est, pour l’heure, la moins connue, mais ses résultats initiaux dans le traitement de la muqueuse de Barrett (EBO) semblent prometteurs [1]. La cryothérapie est effectuée par un spray d’azote liquide à – 196 °C, censé délivrer une énergie de 25 W sur la zone traitée. Deux études rétrospectives de cohortes multicentriques ont évalué son efficacité et sa tolérance dans le cancer de l’oesophage.
1. La première étude concerne 98 patients traités pour dysplasie de haut grade sur EBO, confirmée par 2 anatomopathologistes [2]. Quatre-vingt-trois pour cent (83 %) des patients étaient des hommes, d’âge moyen 65,4 ans. La longueur moyenne d’EBO était de 5,3 cm. Une mucosectomie antérieure pouvait avoir été réalisée avec, alors, persistance d’une dysplasie de ha. Le traitement a été effectué entre 2007 et 2009 dans 9 centres.
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Au total, 333 séances de cryothérapie ont été réalisées (moyenne = 3,4 par patient). L’efficacité a été évaluée chez 60 des 98 patients ayant effectué l’ensemble des séances planifiées, les autres patients étant en cours de traitement au moment de l’analyse. Parmi ceux-ci, 58 (97 %) avaient une disparition complète de la dysplasie de haut grade, 52 (87 %) une disparition de tout grade de dysplasie mais avec persistance d’une métaplasie intestinale, et 34 (57 %) une disparition de tout grade de dysplasie et de la métaplasie intestinale. Le suivi était limité de 10,5 mois en moyenne.
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La tolérance du traitement a été globalement bonne. Des douleurs thoraciques intenses sont survenues chez 2 patients, une hémorragie basse chez 1 patient, mais aucune perforation. Une sténose s’est développée chez 3 patients.
2. La seconde série concerne 79 patients traités pour un cancer de l’oesophage, essentiellement des adénocarcinomes (94 %), après échec thérapeutique ou en cas de refus ou impossibilité d’un traitement standard [3]. Un traitement antérieur par résection endoscopique, photothérapie dynamique, radiochimiothérapie ou chirurgie avait été réalisé chez 53 patients (67 %). La majorité des patients étaient, là encore, des hommes (81 %), d’un âge moyen de 76 ans. Le stade estimé de la tumeur était T1 dans 60 cas, T2 dans 16 cas, et T3 ou T4 dans 3 cas seulement. La longueur moyenne de la tumeur était de 4 cm (1-15 cm). Le traitement a été réalisé entre 2006 et 2009 dans 10 centres.
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L’efficacité a été évaluée chez 49 des 79 patients ayant réalisé toutes les séances de traitement. Une disparition complète de la partie intraluminale de la tumeur a été observée chez 31 patients (61 %), notamment 18 des 24 patients ayant une tumeur superficielle intramuqueuse (75 %). Le suivi moyen était de 10,6 mois seulement.
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Aucun effet indésirable grave n’est survenu. Une sténose bénigne s’est développée chez 10 patients (13 %) dont 9 avaient déjà un rétrécissement lié au traitement antérieur.
Commentaires
Ces deux études suggèrent d’une part, que la cryothérapie oesophagienne est généralement bien tolérée ; d’autre part, qu’elle est efficace pour éradiquer la dysplasie de haut grade sur EBO ou une tumeur intramuqueuse de l’oesophage, tout du moins à court terme. Son efficacité en cas d’infiltration de la sous-muqueuse n’est bien sûr pas établie et paraît peu probable.
Avant qu’elle n’intègre l’arsenal thérapeutique, il faut cependant être conscient des limites de ces d’études :
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En effet, elles sont rétrospectives et non randomisées.
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Le suivi en limité à moins d’un an et donc l’efficacité de la cryothérapie oesophagienne à long terme demeurent inconnus.
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Il n’y avait pas de relecture histologique centralisée, ni de suivi endoscopique standardisé.
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Les critères de traitement complet étaient peu précis.