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2 mars 2010
Digestif

Œsophage de Barrett – Quelle place pour les nouvelles techniques d’imagerie dans la surveillance endoscopique ?

University Hospital Leuven, Dept of Gastroenterology, 49 Herestraat, B-3000 Leuven, Belgium raf.bisschops@uz.kuleuven.ac.be

 

Résumé

L’incidence de la dégénérescence néoplasique dans l’œsophage de Barrett est en nette augmentation dans les pays occidentaux. La surveillance endoscopique visant à détecter cette pathologie à un stade précoce joue un rôle majeur dans la survie globale après chirurgie. Grâce aux techniques nouvelles telles que la résection endoscopique ou l’ablation par radiofréquence, maintenant disponibles pour traiter la maladie de manière moins invasive, la détection précoce de la dysplasie devient un enjeu de tout premier ordre. Récemment, plusieurs procédés nouveaux ont été mis en œuvre, visant à une meilleure efficacité au niveau de la détection de la dysplasie. Ce sont la chromoendoscopie classique, la chromo endoscopie virtuelle, l’imagerie par auto-fluorescence et l’endo-microscopie confocale. Parmi elles , l’imagerie par auto-fluorescence semble la plus prometteuse en tant qu’outil d’alerte alors que la chromoendoscopie virtuelle aide à caractériser les lésions. L’endomicroscopie confocale permet une étude histologique in vivo et aide à confirmer le diagnostic de lésions néoplasiques. En règle générale, le rôle exact de ces nouveaux procédés d’imagerie dans un programme général de détection n’a pas été réellement envisagé, si bien qu’actuellement, le gold standard pour la surveillance de l’œsophage de Barrett reste toujours l’endoscopie haute définition en lumière blanche et le protocole de Seattle.

 

Introduction

L’incidence de l’adénocarcinome œsophagien et de la mortalité qui lui est associée a connu dans les pays occidentaux, une augmentation significative au cours de ces dix dernières d’années [1,2]. Ceci coïncide avec une pandémie de l’obésité et l’incidence accrue de reflux gastro-œsophagien qui l’accompagne [3]. Dans la population générale, l’incidence de l’œsophage de Barrett peut être estimée à partir des études autopsiques entre 0,4 et 0,9 % [4,5]. Une étude suédoise a montré une prévalence dans la population générale de 1,2 % chez les sujets sans symptomatologie de reflux et de 2,3 % chez les sujets signalant un reflux à partir d’un questionnaire standardisé [6]. Dans les centres de référence spécialisés, l’œsophage de Barrett a été trouvé chez 4,9 % des patients avec symptômes ORL atypiques et chez 4,5 % des patients avec des symptômes typiques de reflux [7].

Le dépistage de la dysplasie au décours de l’œsophage de Barrett présente un intérêt indéniable. Tout d’abord, l’incidence annuelle combinée d’adénocarcinome ou de dysplasie de haut grade chez les patients avec œsophage de Barrett non dysplasique est estimée à 1,3 % [8]. Cette incidence est comparable au risque de cancer colorectal calculé sur un an chez les patients de 55 à 60 ans à risque moyen, principale cible du programme de détection des cancers par coloscopie instauré dans de nombreux pays [9]. De plus, les séries rétrospectives de chirurgie ont montré que la surveillance de l’œsophage de Barrett permettait une augmentation de la survie des patients porteurs d’un adénocarcinome [10-15]. Chez ces patients soumis au dépistage, les lésions précoces de stade 0 ou 1 peuvent être détectées dans 76 % des cas alors qu’elles ne le sont que dans 15 % des cas chez les patients non soumis au programme de surveillance. Ceci se traduit par une survie à 3 ans de 80 % et 31 %respectivement [10]. La surveillance endoscopique comprend à la fois une inspection complète des lésions visibles et la prise de biopsies selon le protocole de Seattle (biopsies en quadrants tous les 2 centimètres). On note cependant une adhésion relativement faible des gastro-entérologues à ce protocole qui est souvent considéré comme long et difficile [11]. Récemment, plusieurs procédés nouveaux ont été mis en œuvre, visant à une meilleure efficacité au niveau de la détection de la dysplasie. Ce sont la chromoendoscopie classique, la chromo-endoscopie virtuelle, l’imagerie par auto-fluorescence et l’endo-microscopie confocale.

Cet article a pour but de présenter une vue d’ensemble des recommandations actuelles de l’AGA en matière de surveillance de l’œsophage de Barrett et du rôle potent iel des nouvelles techniques d’imagerie au niveau des différents cas de figures.

 

Recommandations actuelles pour la surveillance de l’œsophage de Barrett

Ces recommandations, résumées dans les figures 1 et 2, sont fondées sur les recommandations récemment mises à jour pour le diagnostic, la surveillance et le traitement de l’œsophage de Barrett, préconisées par le Comité de l’American College of Gastroenterology [17]. En principe, l’intervalle de surveillance est déterminé par la présence et le stade de dysplasie. En règle générale, toute dysplasie doit être confirmée par un histopathologiste expert. La recherche de dysplasie doit se faire préférentiellement chez les patients dont la symptomatologie de reflux est bien contrôlée par un traitement anti-acide. La présence d’une inflammation résiduelle peut être source d’erreur tant au niveau de l’interprétation endoscopique de la muqueuse que de l’interprétation microscopique de la dysplasie en raison des modifications cellulaires d’origine inflammatoire.

Figure 1: Recommandations pour la surveillance endoscopique de l’œsophage de Barrett non dysplasique

Figure 2 : Approche de la dysplasie sur œsophage de Barrett

 

La surveillance endoscopique doit être pratiquée avec un endoscope de haute résolution ou à haute définition. Dans tous les cas, il faut donner la priorité à l’endoscope offrant la meilleure résolution au niveau du service, de manière à obtenir une efficacité optimale dans la détection des lésions néoplasiques précoces [18,19]. Avant le recueil des biopsies, un rinçage soigneux du mucus ou de la salive doit être effectué, et les observations doivent être enregistrées selon la classification de Prague. Ensuite, une inspection complète de tout l’œsophage de Barrett doit être pratiquée à la recherche de petites anomalies visibles. En l’absence de lésions muqueuses visibles, des biopsies en quadrants doivent être pratiquées tous les 2 centimètres suivant le protocole de Seattle. Il est préférable de collecter les échantillons dans des flacons séparés, étiquetés par segment, de façon à retrouver plus facilement la localisation des petites lésions quand la dysplasie est décelée. En effet, en cas de segment de Barrett long ou de patients sous traitement anti-plaquettaire, une hémorragie peut rendre l’examen difficile d’un point de vue technique. Chez ces patients, le protocole dit de « biopsie sèche » doit être retenu. L’application d’une solution d’adrénaline diluée à 10 CC (solution saline à 1/20 000) a récemment été proposée pour faciliter les biopsies en quadrants, réduisant ainsi les risques d’hémorragie et améliorant la visibilité durant la procédure [20]. Les deux premières endoscopies de surveillance doivent être réalisées à un an d’intervalle et en l’absence de dysplasie, un intervalle de trois ans peut être retenu bien qu’il n’y ait aucune garantie de l’absence totale de dysplasie [8]. Si une dysplasie de bas grade (DBG) est mise en évidence, une endoscopie doit être pratiquée dans les six mois pour exclure une dysplasie de haut grade (DHG) ou un cancer précoce (CP).

Si une endoscopie bien conduite avec respect du protocole de biopsies (si possible biopsies en quadrants tous les centimètres) ne révèle pas d’aggravation de la dysplasie, la surveillance peut ensuite se faire chaque année jusqu’à ce que la dysplasie ne soit plus retrouvée. Il est possible que ces recommandations soient encore modifiées dans un avenir proche. L’ablation par radiofréquence (ARF), technique récemment intro-duite et offrant une grande efficacité et sécurité, va sans doute totalement révolutionner la prise en charge des patients avec DBG confirmée [21]. Si deux hist opathologist es confirment le diagnostic de DBG, le risque de dégénérescence vers une néo-plasie plus avancée est plus important. Une série rapporte 41 % de ces patients ayant progressé vers la DBG ou le CP [22].

Quand la DHG est découverte lors d’une surveillance de routine, la confirmation d’un histopathologiste expert est nécessaire. Généralement, un traitement par IPP à double dose est instauré jusqu’à l’endoscopie suivante afin de réduire les réactions inflammatoires. Une endoscopie doit être pratiquée à nouveau dans les 3 mois avec un protocole de biopsies intensives tous les centimètres. En raison de la disponibilité, de l’efficacité et de la sécurité des thérapies endoluminales, la confirmation de la DHG nécessite un traitement supplémentaire. Quand la DHG n’est pas confirmée sur un protocole de biopsies intensives (par exemple, un échantillon seulement contient de la DHG sans qu’elle soit mise en évidence sur d’autres zones), les patients peuvent être suivis tous les 3 mois jusqu’à ce que l’on ne retrouve plus de dysplasie sur 2 ou 3 endoscopies consécutives, ou selon le plus haut grade de dysplasie [17].

 

Techniques d’imagerie avancées pour l’œsophage de Barrett

Au cours de ces dernières années, plusieurs techniques d’imagerie ont été étudiée s pour investiguer l’œsophage de Barrett. Considérant ces études, il est important de faire la distinction entre meilleure détection de la dysplasie et meilleure caractérisation des anomalies visibles. Le fait que la plupart de ces études aient été faites sur une population sélectionnée de patient s porteurs de Barrett avec une prévalence de l’ordre de 60 % constitue un biais important au niveau de la fiabilité diagnostique de ces techniques [18]. En général, les études manquent sur le bénéfice des techniques d’imagerie avancées dans un programme général de surveillance. Il est cependant possible de mieux resituer, détecter et caractériser les zones suspectes dans une population ou chez un patient avec forte suspicion de dysplasie. Enfin, La plupart des études ont été menées dans des centres experts si bien qu’il est difficile de dire si elles pourraient s’appliquer à des services d’endoscopie généraux.

 

La chromoendoscopie classique

Un regain d’intérêt pour la chromoendoscopie est apparu au début des années 2000. La chromoendoscopie est une technique par laquelle certaines caractéristiques muqueuses sont mises en évidence par pulvérisation d’un colorant sur la muqueuse. Les colorations vitales dépendent de la capacité de la muqueuse à absorber certains colorants : par exemple la métaplasie intestinale va absorber le bleu de méthylène et la muqueuse squameuse va absorber le lugol. Certaines colorations de contraste telles que le crésyl violet ou l’acide acétique permettent d’accentuer le relief des cryptes de la muqueuse.

La coloration au bleu de méthylène est au premier abord, un outil de détection très prometteur dans l’œsophage de Barrett. Canto et al. ont montré que les biospies guidées avec coloration au bleu de méthylène amélioraient la détection de la dysplasie, et en particulier, une coloration hétérogène ou une absence de coloration sont sou-vent associées à un risque accru de dysplasie sur la zone concernée [23,24]. Ragunath et al. ont toutefois montré qu’il n’y avait aucune différence d’efficacité entre l’application du protocole de Seattle et les biopsies guidées avec coloration au bleu de méthylène. Soixante-quinze patients ont été étudiés de façon randomisée et croisée avec un intervalle de 6 mois entre le protocole standard de Seattle et les biopsies guidées avec coloration au bleu de méthylène. La détection de la dysplasie était similaire dans les deux groupes ; cependant, le nombre de biopsies dans les deux groupes (c’est-à-dire chez les mêmes patients) était identique [25]. L’inconvénient de la coloration au bleu de méthylène est que la technique de même que l’interprétation de l’intensité de la coloration sont opérateurs dépendantes et qu’elle est souvent perçue comme une méthode salissante et qui requiert beaucoup de temps. Elle permet toutefois de localiser la dysplasie chez les patients où elle est suspectée. Dans les études de Canto et de Ragunath, les patients avec coloration hétérogène pré-sentaient un risque accru de dysplasie.

D’autres études ont montré que la coloration au bleu de méthylène aidait à localiser et à confirmer la dysplasie chez la majorité des patients admis pour suspicion de dysplasie avec un bon score de sensitivité par site, de l’ordre de 83 % [26,27]. L’acide acétique permet de révéler l’aspect des puits glandulaires au niveau de la muqueuse de Barrett. Cinq types de présentations peuvent être observées : rond, linéaire, villeux, cérébriforme et déformé, aidant à faire la distinction entre épithélium cylindrique avec ou sans métaplasie intestinale spécialisée et néoplasie intra-épithéliale. L’acide acétique a permis d’améliorer la définition du stade histologique chez 24 % des patients, comparé au protocole de Seattle standard [28]. De plus, cette classification s’est avérée utile dans l’application de l’imagerie à bandes spectrales étroites également (voir ci-dessous) [29]. La coloration à l’acide acétique est relativement moins compliquée que celle au bleu de méthylène car elle ne requiert aucun rinçage supplémentaire. C’est également une technique de faible coût puisqu’un simple vinaigre du commerce peut être utilisé.

 

Figure 3 : Exemple d’imagerie avancée pour dysplasie de l’œsophage de Barrett

 

Long segment de Barrett avec une petite lésion visible chez un patient adressé pour DHG avec protocole de biopsies randomisées. Une inspection plus poussée à l’aide de l’epk-i montre une lésion de type IIa (cercle) avec relief muqueux et vascularisation irréguliers (flèche). Cet exemple illustre la nécessité d’un nettoyage soigneux et d’un examen complet de l’œsophage quand une DHG a été trouvée au cours d’une endoscopie de surveillance de routine pratiquée précédemment. Le meilleur endoscope disponible en termes de résolution doit être utilisé pour essayer de localiser les lésions de petite taille, ce qui est primordial dans l’optique d’un possible résection. La résection endoscopique de la lésion a décelé un cancer muqueux.

 

La chromoendoscopie virtuelle : NBI, FICE ou i-scan ?

Le recours à la chromoendoscopie classique a été sérieusement compromis par l’introduction de la chromoendoscopie virtuelle.

Les endoscopes de dernière génération combinent la haute définition ou très haute résolution et permettent d’adapter le spectre de lumière blanche. Une meilleure qualité d’image peut être obtenue en utilisant le signal vidéo haute définition (HDTV) doublant le nombre de lignes vidéo par rapport à l’endoscopie à résolution normale, ou en augmentant le nombre de pixels jusqu’à 1 400 000 sur le CCD de l’endoscope en combinaison avec le signal DVI. L’adaptation des longueurs d’onde de lumière visible peut être obtenue par l’imagerie à bandes spectrales étroites (NBI). Ce système permet de déplacer un filtre devant la source de lumière, ne permettant ainsi que le passage de certaines bandes spectrales étroites d’intérêt et favorisant le passage de la lumière bleue. Deux autres méthodes, le système intelligent de rehaussement de structure de Fujinon (FICE) ou i-scan utilisent une analyse informatique post-hoc permettant de traiter les images et de filtrer cer-taines longueurs d’ondes avec un nombre de filtres possibles théoriquement proche de l’infini. De nombreuses études sur ces techniques de NBI et FICE ont été publiées ces dernières années, mais comme toutes ces études ont été réalisées dans des centres hospitaliers experts et incluaient un nombre important de patients adressés pour œsophage de Barrett dysplasique, force est de constater qu’actuellement, ces techniques ne peuvent être applicables à la surveillance de routine. De même, la preuve que ces nouvelles techniques d’imagerie puissent remplacer le protocole de Seattle dans les programmes de surveillance de la population générale n’a pas été démontrée.Une étude s’est attachée à déterminer le rôle potentiel du système NBI dans l’amélioration de la détection de la dysplasie [18]. Chez 65 patients, l’HDTV associé au système NBI a permis de retrouver plus de dysplasie que l’endoscopie à résolution standard en lumière blanche (57 vs 43 %) de même qu’un stade plus élevé de dysplasie. Cependant, en couplant deux méthodes visant à une meilleure qualité d’image, il est difficile dans cette étude de déterminer la valeur exacte du système NBI dans l’amélioration de la détection de la dysplasie. De plus, la haute prévalence de la dysplasie dans cette étude de population n’est pas représentative d’un programme de surveillance standard. Wouters et al. ont évalué l’appréciation subjective des endoscopistes experts quant à la qualité des aspects muqueux et vasculaires en ayant recours à différentes méthodes d’imagerie (chromoendoscopie à l’acide acétique ou à l’indigo carmin, NBI et endoscopie haute définition normale en lumière blanche) [30]. Avec cette dernière, la plupart des experts ont été capables de distinguer les zones avec néoplasie des zones sans néoplasie et les techniques de rehaussement de structure n’ont apporté aucun bénéfice supplémentaire. Ceci pourrait indiquer que les endoscopes avec HDTV ou super CDD et l’amélioration de la qualité d’image qu’ils procurent, seraient d’un meilleur bénéfice pour la détection des lésions que les techniques sophistiquées de rehaussement de structure.

Toutefois, le système NBI permet de caractériser la nature des lésions suspectes. Les lésions avec muqueuse ou vascularisation de relief irrégulier sont fortement suspectes de néoplasie [31]. En particulier, une classification simplifiée des aspects sous NBI paraît très prometteuse pour évaluer les zones suspectes [29].

Quatre types différents peuvent être distingués : A : les puits ronds avec micro vascularisation régulière ; B+C : puits à bords villeux ou absence de puits avec micro vascularisation régulière ; D) puits déformés avec micro vascularisation irrégulière. La mise en évidence de ces aspects permet de prédire avec une bonne fiabilité diagnostique respectivement, la présence d’un épithélium cylindrique sans métaplasie intestinale, d’un épithélium cylindrique avec métaplasie intestinale, et d’une dysplasie de haut grade. Cependant, il est impossible d’affirmer que ces caractéristiques objectivées par les endoscopes avec NBI et zoom peuvent s’appliquer aux endoscopes haute définition NBI standard davantage disponibles.

 

Endomicroscopie confocale : la résolution ultime

L’endomicroscopie confocale est une nouvelle technique d’image-rie consistant en une sonde confocale incorporée à l’extrémité d’un endoscope conventionnel. En plaçant l’endoscope au contact de la muqueuse après application d’une colorant fluorescent (généralement de la fluorescéine administrée par voie intra veineuse), des images confocales peuvent être rapidement obtenues et immédiatement interprétées. Avec une résolution latérale de 0,7µm et un grossissement de 1 000 fois, cette technique permet l’obtention d’images avec une résolution subcellulaire. Une autre système utilisant également u ne sonde permet de donner des images confocales avec un plan fixe au travers du canal opérateur de n’importe quel endoscope avec une plus haute résolution temporelle mais une résolution spatiale moindre. En étudiant l’architecture cellulaire et vasculaire, l’endomicroscopie confocale peut, au cours de l’endoscopie, différencier avec une très bonne fiabilité diagnostique, la muqueuse gastrique de la métaplasie intestinale spécialisée et des altérations néoplasiques [32-35].

 

Figure 4 : Exemple d’endomicroscopie confocale sur un petit cancer muqueux visible (T1am3)

 

Image NBI d’un long segment d’œsophage de Barrett montrant une petite lésion de type IIa avec friabilité accentuée après passage de l’endoscope (pas de biopsies). L’endomicroscopie confocale (EMC) montre une muqueuse de Barrett normale non dysplasique (image de gauche) montrant un épithélium cylindrique avec quelques cellules à mucus sombre (flèche). Les images d’EMC de droite, au contraire, mettent en évidence une interruption de la structure régulière à l’intérieur de la lésion. La présence de « cellules noires » typiques et de villosités irrégulières est le signe d’altérations néoplasiques (triangle blanc). De plus, des vaisseaux irréguliers avec fuite de fluorescence sont visibles (triangle rouge) [32].

 

L’auto-fluorescence en tant que technique d’alerte ?

L’imagerie par auto-fluorescence (IAF) a récemment été introduite comme possible méthode d’alerte [36-38]. Il est bien sûr impossible de scanner toute la surface de l’épithélium de Barrett sur un très long segment, ou même de pratiquer une évaluation détaillée en utilisant le système NBI avec zoom.

Les modifications des structures cellulaires et nucléaires impliquées dans la néoplasie donnent un signal d’autofluorescence tissulaire différent : des zones pourpres apparaissent sur un fond verdâtre. Dans une étude prospective multicentrique [38], le potentiel diagnostique d’un nouveau système d’imagerie trimodal a été étudié chez 84 patients porteurs d’un œsophage de Barrett. Le système comporte trois types d’imagerie : la haute résolution en lumière blanche (HRE), l’IAF et l’imagerie NBI. Après examen par HRE suivie d’IAF, les lésions détectées avec une technique ou l’autre ont été analysées par NBI et NBI + grossissement. Selon la structure muqueuse ou vasculaire, les lésions étaient classées comme suspectes, non suspectes ou indéterminées pour la néoplasie. Au total, 30 sur les 84 patients ont eu un diagnostic de DHG/cancer précoce, dont 16 détectés par HRE et 3 sur biopsies randomisées. L’IAF a donc permis d’augmenter la détection de lésions néoplasiques de 53 à 90 % (soit chez 11 patients de plus). L’HRE tout comme l’IAF présentait au niveau de la détection des lésions un taux de faux-positifs élevé qui pourrait être abaissé par une investigation supplémentaire avec grossissement par NBI mais au risque de passer à côté de lésions néoplasiques chez 3 patients. A nouveau, on notait une forte prévalence de la dysplasie dans cette étude. Il reste donc à savoir quels seraient les résultats de cette technique dans un programme général de surveillance de l’œsophage de Barrett avec des patients sans diagnostic précédemment posé de néoplasie intra épithéliale de haut grade ou de cancer et en dehors de tout centre expert. Bien que le auteurs insistent particulièrement sur le taux élevé de faux-positifs de l’IAF dans la détection des lésions néoplasiques comme inconvénient possible de cette technique, en cas de dépistage de tumeurs, il est probablement davantage justifié d’accepter ce taux relativement haut de faux-positifs que de le diminuer au risque de passer à côté de lésions malignes.

Actuellement, les gastro-entérologues pratiquent un nombre important de biopsies ce qui également représente un taux pratiquement infini de faux-positifs. Il faut donc considérer toute technique facile à utiliser et plus efficace pour guider la pince à biopsie comme un avantage supplémentaire dans la détection du Barrett et de la néoplasie associée.

 

Conclusion

La surveillance des patients avec œsophage de Barrett est nécessaire en raison du risque associé de développer un adéno-carcinome et du bénéfice en termes de survie lorsque les lésions sont détectées à un stade précoce. Les recommandations actuelles préconisent toujours les biopsies en quadrants tous les 2 centimètres en cas de Barrett non dysplasique avec un intervalle de 3 ans lorsque deux endoscopies de surveillance correctement pratiquées ont été négatives les deux années précédentes. Actuellement, il n’a pas été démontré que ce protocole pourrait être remplacé par les nouvelles techniques d’imagerie car la plu-part des études utilisant ces techniques concernent des patients adressés pour dysplasie et ne sont menées que dans des centres experts ayant une très haute expérience et utilisant souvent des endoscopes prototypes. Des études complémentaires seront nécessaires pour évaluer la fiabilité et l’efficacité de ces techniques dans la détection de la dysplasie dans un contexte de surveillance d’une population générale au sein de centres hospitaliers standard. Actuellement, l’imagerie par auto-fluorescence semble la technique la plus prometteuse comme méthode d’alerte.