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2 mai 2011
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Antagonistes du récepteur de l’angiotensine II (ARA 2) et cancer : un risque non nul !

Les ARA 2 utilisés au long cours pourraient accroître l’incidence de certains cancers. Mais cette augmentation, qui reste à confirmer, demeure quoi qu’il en soit minime au regard d’un bénéfice cardiovasculaire jugé important.

Les ARA 2 sont une classe médicamenteuse largement utilisée dans le traitement de l’hypertension artérielle (HTA), de l’insuffisance cardiaque et de la néphropathie diabétique. Ils sont également prescrits en prévention du risque cardiovasculaire chez les sujets à haut risque ne pouvant recevoir des inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC).

Une étude randomisée en 2003 testant le Candesartan versus placebo avait retrouvé une incidence anormalement élevée de cancers dans le groupe traité par ARA 2. Une métaanalyse des principaux essais vient donc d’être réalisée pour évaluer un éventuel sur-risque de cancer lié à la prescription d’ARA 2 [1].

Patients et méthodes

 Par une recherche bibliographique sur plusieurs bases de données, tous les essais randomisés avec ARA 2 ont été recensés. Ont alors été éliminés les essais avec suivi inférieur à 1 an, incluant moins de 100 patients ou sans bras contrôle. Finalement, sur les 60 essais retenus n’ont été analysés que les 5 essais (n=61 590 patients) contenant des données exploitables sur l’incidence de nouveaux cas de cancers, ce qui représentait l’objectif principal de l’étude. Pour l’objectif secondaire, détaillant l’incidence de tumeurs solides spécifiques, 5 études furent également retenues avec 68 402 patients inclus. Il s’agissait, dans tous les cas, d’études prospectives randomisées en double aveugle.

Résultats

Le telmisartan était l’ARA 2 le plus utilisé, et était retrouvé chez 30 014 patients avec une compliance au traitement de 77 à 85 %. La métaanalyse montrait un risque augmenté de nouveaux cas de cancer chez les patients traités par ARA 2 (7,2 % vs 6,0 %, RR 1,08 ; IC 951 : 01-1,15 ; p = 0,016). Ceci restait vrai si on se limitait aux 3 essais uniquement avec telmisartan (RR 1,07 ; 95 % ; CI 1,00-1,14 ; p = 0,05). La co-prescription ou non d’IEC ne modifiait pas ce risque.

L’incidence de nouveaux cas de cancer du poumon était significativement augmentée, ce qui n’était pas le cas pour les cancers du sein ou de la prostate.

Enfin, un calcul démontrait que pour un cas de cancer supplémentaire causé par les ARA 2, 143 patients devaient être traités durant 4 ans…

Commentaires

Les ARA 2 pourraient, en bloquant le récepteur de l’angiotensine, stimuler l’angiogenèse tumorale. Cet effet étudié in vitro et in vivo chez l’animal n’est pas démontré chez l’homme à ce jour. Même si l’augmentation d’incidence des cas de cancers sous ARA 2 semble réelle, elle reste modeste pour un bénéfice cardiovasculaire jugé important. De plus, la métaxanalyse n’était pas basée sur des données individuelles.
Au total, cette question reste ouverte et doit inciter à recueillir de nouvelles données prospectives avant d’alarmer les patients.

Référence

[1] Sipahi I, Debanne SM, Rowland DY, et al. Angiotensin-receptor blockade and risk of cancer:meta-analysis of randomised controlled trials. Lancet Oncol 2010;11:627-36