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14 juin 2012
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Carcinome hépatocellulaire : faut il encore utiliser les critères RECIST pour évaluer l’efficacité du sorafenib?

A la condition que la concordance inter-obervateur soit acceptable, les critères mRECIST ( qui ne prennent en compte  que les modifications de la partie de la cible avec rehaussement par le produit de contraste) pourraient permettre de mieux évaluer le bénéfice en survie à attendre du sorafénib chez les patients ainsi traités pour CHC.

 

Comparison of tumor response by Response Evaluation Criteria in Solid Tumors (RECIST) and modified RECIST in patients treated with sorafenib for hepatocellular carcinoma.
Edeline J, Boucher E, Rolland Y, Vauleon E, Pracht M, Perrin C, Le Roux C, Raoul Cancer. 2012;118(1):147-56.

 

Le carcinome hépatocellulaire (CHC) est la troisième cause de décès par cancer dans le monde. Lors du diagnostic la  plupart des patients a une maladie avancée et ne peut bénéficier d’un traitement curatif.

 

Le sorafenib (Nexavar®) est une biothérapie anti angiogénique qui a montré dans l’étude SHARP  une amélioration de la survie globale de 10,7 mois versus 7,9 mois dans le bras sorafenib par rapport au bras placebo. Bien que dans cette étude, le taux de réponse objective selon les critères RECIST était de 2% dans le bras sorafenib, celui-ci est devenu traitement de référence pour les CHC avancés et inopérables, non accessibles à un traitement de destruction locale ou à une embolisation trans-artérielle (1).

 

En pratique clinique, l’absence de signes clairs d’efficacité thérapeutique pose problème en particulier chez les patients qui présentent des toxicités. Enfin il est difficile de choisir des critères de jugement dans les phases II avec un bras sorafenib.

 

Depuis 2000 et la conférence de consensus de l’EASL (European Association for study of the liver) sur le traitement du CHC, il apparaît que la vascularisation des lésions avant et après traitement est un point clef dans l’évaluation de la réponse au traitement. Une adaptation des critères RECIST appelé « RECIST modifiés » (mRECIST) a été établie (2).

L’étude ici rapportée,  avait pour but d’évaluer la réponse au traitement par sorafenib en appliquant les critères mRECIST chez des  patients porteurs d’un CHC ainsi traité (3).

 

Patients et méthodes

 

Les auteurs ont analysé de façon rétrospective les patients traités par sorafenib dans leur institution. Les patients éligibles présentaient un CHC diagnostiqué par une biopsie ou selon les critères de Barcelone. Ils avaient bénéficié d’un scanner moins d’un mois avant le début du traitement, et l’évaluation de l’efficacité thérapeutique se faisait par au moins deux TDM successives réalisées tous les 2 mois.  Il y avait au moins une lésion cible. Etaient exclus les patients pré-traités par un traitement systémique, une chimioembolisation ou une radiofréquence.

 

Tous les scanners ont été relus par deux oncologues médicaux spécialisés dans le cancer du foie et la réponse tumorale a été évaluée selon les critères RECIST et mRECIST. Pour l’évaluation RECIST l’ensemble de la lésion était prise en compte pour la mesure,  alors que pour le mRECIST seule la partie rehaussée par le produit de contraste était évaluée.

 

Résultats

 

Au total 56 patients ont été rétrospectivement évalués dont 53 à la fois en RECIST et mRECIST.
Le taux de réponse objective était de 1,9% en RECIST contre 22,6% en mRECIST ( p< 0,001).

 

  • Le temps médian à progression était similaire avec les deux méthodes 4,1 mois (95% CI, 2,8-5,4 mois) en RECIST et 3,9 mois en mRECIST (95% CI, 2,8-5,1 mois).
  • Les réponses en critères RECIST et mRECIST étaient bien corrélées à la survie.
  • En revanche, parmi les 42 patients classés stables en RECIST, le pronostic était significativement différent selon la reclassification en mRECIST avec alors 17,1 mois de survie globale pour les patients en réponse objective, 9,7 mois pour les patients stables et 3,7 mois pour les patients progressifs.

Commentaires

 

Les critères mRECIST permettent de classer de façon plus précise les répondeurs au sorafenib, et permettent chez les patients stables en RECIST de distinguer le sous groupe des patients qui bénéficieront le plus du traitement. Ceci est particulièrement intéressant chez les patients dont la tolérance est médiocre.

 

Alors que la mesure unidimensionnelle des cibles (RECIST) est objective il peut exister des discordances inter-observateur  pour l’évaluation des critères mRECIST. La question est donc posée à nos radiologues : doit-on choisir d’évaluer nos patients en mRECIST et cette méthode est elle parfaitement reproductible d’un centre à l’autre ?

 

Références

 

1. Llovet JM, Ricci S, Mazzaferro V, Hilgard P, Gane E, Blanc JF, de Oliveira AC, Santoro A, Raoul JL, Forner A, Schwartz M, Porta C, Zeuzem S, Bolondi L, Greten TF, Galle PR, Seitz JF, Borbath I, Häussinger D, Giannaris T, Shan M, Moscovici M, Voliotis D, Bruix J; SHARP Investigators Study Group. Sorafenib in advanced hepatocellular carcinoma. N Engl J Med. 2008 Jul 24;359(4):378-90

 

2. Lencioni R, Llovet JM. Modified RECIST (mRECIST) assessement for hepatocellular carcinoma. Semin Liver Dis. 2010;30:52-60.

 

3. Edeline J, Boucher E, Rolland Y, Vauleon E, Pracht M, Perrin C, Le Roux C, Raoul. Comparison of tumor response by Response Evaluation Criteria in Solid Tumors (RECIST) and modified RECIST in patients treated with sorafenib for hepatocellular carcinoma. Cancer. 2012;118(1):147-56.